Carnet de notes :
Le reflet des apprentissages
du réseau RECODE.

LEÇONS

Ce que nos partenaires ont appris sur le recodage des études supérieures.

Les institutions établies accordent beaucoup d’importance à la crédibilité. Bâtissez la vôtre en misant sur vos rapports avec des alliés qui inspirent confiance.

Dans un milieu institutionnel parfois hésitant à adopter des idées novatrices, la crédibilité est un ingrédient essentiel à la création du changement. C’est la capacité d’inspirer confiance et de convaincre, un attribut que possèdent rarement les projets sans réalisation à faire valoir. Si vous n’avez pas vous-même cette crédibilité, il peut être crucial de miser sur vos rapports avec des partenaires établis pour calmer les appréhensions des décideurs et faire entendre vos nouvelles idées.

En 2015, NouLAB a reçu des fonds du gouvernement du Nouveau-Brunswick. Du jamais vu pour un lab social universitaire qui explorait des solutions aux difficultés systémiques de la province – et tout un exploit pour NouLAB! La cofondatrice Karina LeBlanc attribue ce succès notamment aux partenariats avec le MaRS Solutions Lab et GovLab. Karina croit que l’aval de ces organismes respectés, combiné au financement catalyseur de RECODE, a aidé NouLAB à bâtir le capital social requis pour mettre la barre aussi haute et faire avancer un nouveau projet dans un établissement important.

La réconciliation nous a montré que pour enseigner, l’université doit aussi écouter et apprendre.

Pour participer de manière signifiante à la réconciliation, les établissements d’études supérieures doivent reconnaître leur rôle dans l’histoire coloniale du Canada et saisir de quelle façon l’héritage des pensionnats continue d’influencer la perception du système d’éducation du Canada. Ils doivent cesser de privilégier un seul mode de savoir au détriment des autres et inciter leurs maîtres à penser à aborder leurs partenariats communautaires avec humilité afin de cultiver une nouvelle identité pour les établissements, qui seront à la fois apprenants et enseignants.

La veille du Sommet 2016 de l’innovation autochtone, RECODE et Junxion, avec l’appui d’In-Synch Consulting, ont cofacilité un dialogue sur la réconciliation en explorant divers moyens pour les établissements postsecondaires d’appuyer l’entrepreneuriat autochtone. Un thème clé a été la tension entre la langue entrepreneuriale et les modes de savoir autochtones. Ainsi, l’entrepreneuriat focalise souvent sur la perturbation, le leader pionnier et l’accumulation de richesse, alors que les partenaires autochtones ont noté qu’ils donneraient plutôt la priorité aux systèmes naturels, à la collaboration dans la collectivité et au partage de la richesse. Pour en savoir plus au sujet du dialogue sur la réconciliation, l’éducation et l’entrepreneuriat, veuillez consulter le rapport final Réflexions et observations.

Dans une session de 13 semaines, toutes les semaines ne sont pas égales.

Il est important de comprendre le contexte où s’inscrit votre travail – les activités extrascolaires sont importantes sur le campus, mais pour les étudiants, la priorité reste de réussir les cours (et payer les factures). Cela veut dire que le travail sur le campus doit tenir compte du cycle de la session. Le facteur temps influence chaque étape du projet, qui doit s’intégrer dans un étroit créneau chronologique. Il est généralement trop tard pour mener des projets au moment où les étudiants achèvent leurs travaux – mais il est aussi souvent trop tôt quand ils n’ont pas fini de choisir leurs cours. Assurez-vous que les nouvelles exigences concordent avec les brèves périodes d’accalmie dont disposent les étudiants.

Les campus ont un calendrier impitoyable et Ryan Murphy de hackED l’a appris à ses dépens l’an dernier. L’équipe de hackED a dépassé l’échéance d’une tâche clé dans l’espoir d’obtenir plus d’inscriptions et cela s’est répercuté sur le travail nécessaire pour réussir le programme. Le retard a fait boule de neige et l’équipe de hackED a dû se débattre pour organiser des activités au beau milieu de la période d’examens. Il était trop tard pour corriger l’erreur et un banal contretemps survenu en septembre a eu pour effet de limiter la participation des étudiants aux programmes à la fin de la session.

« Rien sur nous sans nous », de dire les étudiants et tous les autres intervenants n’ayant pas été invités à la table.

Les défis conceptuels sur le campus sont d’excellents outils d’apprentissage expérientiel pour les étudiants qui appliquent leur savoir et leurs compétences nouvellement acquis à l’amélioration de leur école. Mais quand le défi est conçu sans le point de vue de l’équipe des opérations de l’établissement, des étudiants pleins d’énergie risquent de rater la cible. Pour concevoir un défi efficace sur le campus, faites participer l’équipe des opérations dès le début. Son point de vue contribuera à cibler des problèmes plus pertinents et son savoir aidera les étudiants à appliquer les solutions pratiques qu’ils ont conçues.

James Stauch a eu l’intuition d’inviter un membre de l’équipe des opérations de l’université comme juge d’un défi en vue d’améliorer le campus de MRU. L’année suivante, il a demandé aux membres de l’équipe s’ils voulaient servir de mentors aux étudiants pendant le défi. Il a fini par réaliser que s’il focalisait sur les liens avec l’équipe des opérations et l’invitait à participer à la conception même du défi, l’équipe canaliserait l’énergie des étudiants vers un domaine pertinent et ceux-ci seraient en meilleure position de mettre leurs idées en œuvre. Les étudiants ont récemment travaillé avec l’équipe des opérations pour peindre une murale illustrant la relation qu’entretient la nation des Pieds-Noirs avec le terrain occupé par l’université. La collaboration a remporté un tel succès que depuis, l’équipe des opérations et les étudiants travaillent ensemble à d’autres projets sur le campus.

L’innovation sociale n’est pas un concept difficile à saisir, alors ne le présentez pas comme tel.

Pour élargir votre base et travailler avec des auditoires ayant des bagages culturels et universitaires diversifiés, il faut parler leur langue. Malgré son utilité pour exprimer des concepts dans certains contextes, le lexique de l’innovation sociale est inintelligible et aliénant dans d’autres. À l’arrivée de nouveaux partenaires, faites l’effort de traduire vos concepts dans leur langage et abattez un obstacle à leur participation. Tout compte fait, vous serez surpris de voir que plusieurs groupes disposent d’un vocabulaire utile pour décrire l’innovation sociale.

Pour l’Impact Week à UBC, Bruno Lam et ses collègues étudiants voulaient recruter des participants à l’extérieur du milieu de l’innovation sociale et l’entrepreneuriat social. Plutôt que d’utiliser le jargon de l’innovation sociale dans leur marketing, ils ont choisi des mots clés pertinents pour leur clientèle cible en gestion. Ainsi, une affiche montrait des courtiers avec l’inscription «La finance peut combattre les changements climatiques. L’émission d’obligations vertes a bondi de 9 G$ à 72 G$ en 3 ans». Cela a augmenté le nombre de participants à l’Impact Week, notamment 200 étudiants de l’école de gestion.

Il faut une première collision pour déclencher des réactions en chaîne.

Créez les conditions propices à des interactions fructueuses entre partenaires au-delà du travail en vase clos. Les équipes multi-institutionnelles décentralisées ne se croisent pas chaque jour par hasard – elles ont besoin d’une occasion pour se connecter. Considérer comme prioritaire de réserver du temps pour bâtir l’équipe à l’arrivée d’une nouvelle cohorte peut produire un travail plus éclairé, plus collaboratif et plus focalisé – et déclencher une réaction en chaîne de nouveaux partenariats.

La première année, Nicolas Nadeau, responsable de CHNGR, a réalisé qu’il manquait une étape clé pour renforcer l’équipe et stimuler la création de liens – il n’y avait notamment pas eu de retraite réunissant en personne l’ensemble de l’équipe. Conscient de cette erreur, CHNGR a plus tard établi clairement que les rencontres sont une activité fondamentale du projet. L’an deux a commencé par une retraite obligatoire conçue conjointement – et pas question de la rater. L’étudiant qui ne venait pas à la retraite ne pouvait pas participer au programme. Ce premier rassemblement a complètement changé le ton de la cohorte et a donné lieu à des projets et à des collaborations intercampus plus solides.

Créer un changement plus grand que soi en comprenant l’histoire de l’autre.

Faire de l’innovation sociale et de la création du changement la nouvelle norme dans les études supérieures exige un immense courage pour affronter les difficultés et forger des liens solides fondés sur la confiance. Il y aura inévitablement des heurts – nous avons souvent besoin d’un réseau d’alliés capables de reconnaître notre voyage, de nous encourager et de nous soutenir. Les compagnons de voyage qui comprennent notre vision nous aident à éviter l’épuisement et nous font voir les changements subtils mais importants qui pourraient échapper à notre attention. La capacité de voir plus loin que notre histoire personnelle et de considérer celle des autres avec empathie est un facteur critique pour approfondir tout travail collectif en vue d’un changement systémique.

L’un des moyens clés utilisés par Ashoka pour bâtir la confiance et forger des liens est de comprendre l’histoire des partenaires créateurs du changement sur le campus. Voici comment Danica Straith, responsable d’Ashoka U au Canada, commence ses entrevues de leaders : «Où avez-vous grandi? Pourquoi faites-vous ce travail? Est-ce qu’une difficulté quelconque pourrait vous arrêter?» Le processus culmine par une rencontre d’équipe où chacun raconte son histoire de créateur du changement. Le partage de ces expériences et la connexion avec l’histoire de chacun deviennent un élément de base du potentiel de réussite du groupe en tant qu’équipe.

Comme partenaires, Ashoka et RECODE ont aussi pris le temps de comprendre l’histoire respective de leurs organisations; c’est ce qui leur a permis de concevoir des stratégies complémentaires pour appuyer la création du changement et l’innovation sociale. Ainsi, RECODE fournit du capital-risque en phase de démarrage et un ancrage qui permet aux établissements d’expérimenter de nouvelles façons de travailler. Ashoka mise sur les assises établies par RECODE en offrant aux établissements une voie vers le changement et les aide à codifier la création du changement dans leur mode de fonctionnement. RECODE est un champ où fleurissent un millier de fleurs, Ashoka les aide à former un bouquet.

La co-occupation d’entreprises sociales et ordinaires sur les campus permet à chacune d’avoir un impact social plus grand.

Il est vrai que les établissements d’enseignement offrent un terrain d’essai unique aux projets sociaux, mais ceux-ci sont souvent soutenus en silos. La co-occupation d’entreprises sociales et de programmes d’entrepreneuriat universitaires permet de les intégrer au courant dominant, en plus de leur faciliter l’accès à des ressources, de l’espace, des connaissances et des collaborateurs. La co-occupation améliore également l’exposition des entreprises sociales au sein de la communauté des entreprises en démarrage et donne la chance aux entrepreneurs en herbe de découvrir des projets créant une valeur sociale.

En incubant des projets sociaux dans un accélérateur indépendant, Jana Svedova, étudiante à la Sauder School of Business de l’Université de Colombie-Britannique, a compris qu’elle avait raté l’occasion de modéliser la valeur de ces derniers à l’intention des entrepreneurs conventionnels motivés par le gain. L’Université a ensuite décidé que l’incubateur de projets sociaux partagerait un espace avec le programme d’incubation de « projets conventionnels », c’est-à-dire qu’ils co-occuperaient un lieu. Le résultat s’est avéré mutuellement avantageux, et ce, à plusieurs niveaux. Des entrepreneurs en herbe ont notamment appris comment produire une valeur sociale grâce à des exemples concrets. Un fauteuil roulant à la verticale pour les gens aux prises avec des problèmes de mobilité appelé « The Alinker » est un exemple. Les entrepreneurs conventionnels de l’accélérateur étaient d’abord sceptiques face à la viabilité du produit vu son marché restreint. Ils ont cependant rapidement réalisé sa grande valeur sociale en voyant le PDG de The Alinker se rendre à leur incubateur commun à l’aide de celui-ci.

Il est impossible pour les étudiants de trouver la bonne solution sans définir le vrai problème.

À une époque de ruée d’or pour les entreprises en démarrage, les étudiants sont portés à croire qu’il suffit d’imaginer des solutions pour réussir. Pourtant, bien que les méthodes d’entrepreneuriat aident les étudiants à concrétiser leurs idées, solutionner le mauvais problème n’est aucunement une solution. C’est plutôt un gaspillage d’énergie précieuse, de ressources financières et de capital humain. Il faut donc aider les étudiants à définir clairement le problème avant de les inciter à trouver des « solutions ».

« Si vous pensez avoir une solution, demandez-vous d’abord qui vous a demandé de résoudre le problème? »
– Skoll World Forum on Social Entrepreneurship

Dan et son équipe en avaient assez de voir des étudiants proposer des solutions bien intentionnées, mais superficielles. C’est pourquoi ils se sont joints à la Skoll Foundation et à RECODE pour créer une compétition de définition de problèmes. Au lieu d’encourager les étudiants à trouver rapidement des solutions, celle-ci les amenait à définir le problème de la manière la plus sophistiquée possible. Pour ce faire, ils ont utilisé plusieurs outils, par exemple l’Impact Gaps Canvas. Élaboré par Daniela Papi-Thornton, celui-ci aide les étudiants à mieux comprendre un problème avant de tenter de le résoudre. Vous pourrez en apprendre plus sur cet outil à l’adresse suivante : http://tacklingheropreneurship.com/the-impact-gaps-canvas/

Suivre le courant de l’établissement (tout en restant dans son propre bateau).

Au lieu de créer un autre projet isolé que l’université devra gérer, l’innovation sociale doit être positionnée comme un moyen d’atteindre les objectifs actuels de celle-ci. Il faut obtenir du soutien en alignant ses travaux à la stratégie de l’établissement et en comprenant les défis que rencontrent ceux qui tentent de la mettre en œuvre. Il faut recevoir l’appui de la direction dès le départ, sans perdre de vue sa stratégie au moment de l’institutionnaliser. Enfin, il faut toujours maintenir son espace d’innovation.

Shawn Smith et Donovan Woollard, codirecteurs de RADIUS SFU, savaient que leur réussite dépendait d’un alignement avec le mandat premier de l’Université Simon Fraser (SFU), c’est-à-dire être l’université canadienne la plus engagée sur le plan communautaire. Ils avaient aussi compris que RADIUS devait garder une certaine indépendance pour pouvoir innover. Ils ont donc élaboré le programme de manière à fonctionner en marge de l’université, avec le soutien des innovateurs étudiants et communautaires, et tout en aidant à diriger d’importants projets institutionnels. Ils ont aussi conçu une marque bien définie, qui est à la fois liée à celle de l’université, mais aussi distincte de celle-ci. RADIUS a profité de l’appui de plusieurs dirigeants qui ont reconnu le programme comme crucial pour aider à atteindre les objectifs de l’université et cela a contribué à protéger son espace d’innovation.

La participation de RADIUS au programme RECODE et au processus de désignation « Ashoka U Changemaker » au nom de SFU représente un élément clé de son succès. Celle-ci a permis aux dirigeants institutionnels de réfléchir à la manière dont l’innovation sociale appuie leur stratégie, tandis qu’une reconnaissance par des tiers a permis de rendre leur appui encore plus légitime.

Il est nécessaire d’embaucher un bâtisseur de pont compétent au moment de construire un pont entre les campus et les communautés.

Les établissements qui proposent des occasions d’éducation expérientielle peuvent propulser l’innovation sociale par le placement communautaire de leurs étudiants. Pourtant, il peut s’avérer difficile pour les organismes qui cherchent à établir un partenariat avec un cégep ou une université, ou pour les étudiants ou professeurs qui souhaitent établir un partenariat avec un organisme, de trouver un partenaire. Il importe donc de reconnaître cette lacune et d’embaucher quelqu’un pour la combler.

Ce n’est pas tout le monde qui peut agir comme un bâtisseur de pont efficace lorsqu’il est question de partenariats entre les campus et les communautés. Suzie Addison-Toor, qui travaille au Georgian College’s Centre for Social Entrepreneurship, a compris qu’un bâtisseur de pont compétent doit posséder une certaine crédibilité à l’intérieur comme à l’extérieur de l’établissement d’enseignement. Il doit aussi avoir de l’expérience en matière d’enseignement afin que d’autres éducateurs puissent le respecter et écouter ses conseils. Au fil du temps, Suzie a acquis de la reconnaissance en tant que bâtisseuse de pont et des organismes communautaires l’approchent aujourd’hui sachant qu’elle peut les mettre en contact avec d’excellents étudiants et professeurs. Suzie et son équipe créent actuellement des profils sur les partenariats campus-communautés ainsi que des prix pour inspirer d’autres professeurs à essayer cette approche.

Les semences des projets sociaux se cultivent mieux dans des jardins bien entretenus.

Il faut plus qu’un simple financement de démarrage pour garantir la réussite de projets sociaux dirigés par des étudiants. Ces derniers ont besoin d’un écosystème de soutien pour aller au-delà de l’étape de germination et développer leur projet : relations, mentorat, environnement de co-travail, etc. Offrir un financement de démarrage pour obtenir leur attention ne suffit pas. Les ressources doivent principalement être utilisées pour leur fournir le soutien requis dont ils ont besoin pour prospérer.

Un des espaces d’incubation de l’Université Ryerson, la Social Ventures Zone (SVZ), se démarque en favorisant l’innovation au sein d’un environnement offrant de la sécurité et un grand soutien. Monica Jako, la cofondatrice de SVZ, considère cet écosystème de soutien, et non le financement de démarrage offert par le programme, comme la clé de la réussite à la fois du programme et des projets étudiants. Monica priorise cet écosystème en investissant dans du personnel, des mentors et des coachs pour conseiller les participants. Elle les met aussi en contact avec des partenaires industriels et institutionnels, et propose des ateliers sur des sujets comme la finance sociale et la pensée créative. SVZ a appris qu’un investissement intégrant dans l’entrepreneuriat étudiant, c’est-à-dire qui va plus loin qu’un simple soutien financier, fait toute une différence et assure la prospérité des étudiants et de leur projet.

CONTRIBUTEURS

Merci à tous nos collaborateurs de partager leurs réflexions, leurs apprentissages et leur temps précieux.

CONNECTER

Qu’avez-vous appris du recodage des études supérieures cette année? Partagez vos #RECODEnotes sur Twitter ou envoyez un courriel à Chad, à clubelsky@mcconnellfoundation.ca.

RECODE est un programme de La fondation de la famille J.W. McConnell.


 

Créé en collaboration avec Adjacent Possibilities, avec des œuvres de Leeay Akiawa.